Vol Casa - Paris - J4U 2518
Spinoza continue à me tenir compagnie durant ce vol de retour - J'ai découvert le plaisir des compagnons de voyages invisibles. Certains sont ainsi à mes côtés, depuis des années, parfois malgré eux. Leur présence me donne l'occasion de conversations silencieuses et animées. Mais c'est la première fois que Spinoza me fait l'honneur de sa présence, assis siège 16F entre mon ami Simo, qui s'est endormi, et moi
"Nous ne désirons pas les choses parce que nous les trouvons bonnes mais nous les jugeons bonnes parceque nous les désirons"
Ainsi donc au commencement était le désir, bien avant le jugement. Admettons l'idée... Mais quid du verbe ? J'ai grandi dans la une culture où le verbe était au commencement de tout. Alors le verbe ou le désir ? Spinoza ou St Jean ?
Et soudain ! une idée délicieuse ! marier verbe et désir. Apprendre à conjuguer le désir au verbe. Et la joie de sentir émerger une vérité en accord profond avec mon expérience .... Le désir d'écrire indissociable de l'écriture du désir ... et non ! ce n'est pas une figure de style, c'est juste une évidence absolue. Et je me moque ce soit un chiasme ... d'ailleurs je me moque des chiasmes. Les chiasmes sont juste des mots, et moi j'ai tellement envie de mots justes, qui disent combien mon désir de vivre, de comprendre, de partager, est intimement lié au plaisir d'écrire. Combien cette découverte a été une double rencontre en moi et hors de moi, un cadeau dont je suis empli de reconnaissance.
Bon calmons-nous, me dis-je, tout cela est bien ésotérique, ma note ressemble à une "private joke" tellement privée qu'il n'y a que moi qui peut la comprendre. Aux plaisirs solitaires j'ai toujours préféré les joies partagées. Alors, pour le lecteur doublement improbable, qui se serait aventuré sur cette page et serait parvenu jusqu'ici, je lui avouerai les mots de cette note sont une manière de célébrer cette double rencontre, de remercier quelqu'un qui m'est cher qui, lui aussi, m'accompagne au quotidien dans tous mes instants, qui aime l'écriture, les mots, et qui ne les lira pas pourtant... Et que c'est ainsi. Et que je l'accepte parce que, au delà de leur sens présumés, clairs et obscurs, les mots peuvent être juste là pour scintiller dans le noir, comme des étoiles dans un ciel d'été, et veiller silencieusement, bien au dessus de leur tête, sur ceux que l'on aime et qui vous ont aimé.
On peut y tracer des lignes, y chercher des constellations, y vouloir lire l'avenir, mais ils ne sont pourtant que la preuve lumineuse que le désir du premier instant est toujours vivant ...
PS. Et Spinoza me pardonnera que ses mots aient servi de prétexte à ce vagabondage, je savais que pour s'envoler, certains avaient besoin de fumer des substances illicites, j'ignorais que le livre III de l'Ethique puisse avoir un effet équivalent ...
Lorsque tu imagines Spinoza à côté de toi dans l'avion, ça me
rappelle les idées de ce livre : Le journal intime
intensif(www.amazon.fr/journal-intime-intensif-Ira-Progoff/dp/2761903366).
Ira Progoff y conseille de dédier une partie de son journal personnel
à inventer des dialogues avec des personnes qui nous sont chères. Et
je pense qu'en effet ça peut nous aider à mieux les comprendre.
Je n'ai pas lu ce livre de Spinoza, mais j'ai trouvé une version en
ligne ici : http://fr.wikisource.org/wiki/L%E2%80%99%C3%89thique, il faudra
que je le lise à l'occasion.
Merci pour cette petite réflexion personnelle.
Rédigé par : Argancel | 28 septembre 2009 à 11:43